Derrière chez Martin

  De même qu'il y a plus d'un âne à la foire qui s'appelle Martin s'il faut en croire le dicton familier, de même Marcel Aymé a-t-il étiqueté ce patronyme sur plus d'un personnage dans le recueil de nouvelles qu'il intitule Derrière chez Martin.
Le premier est le romancier .Martin dont le regrettable penchant à faire mourir ses protagonistes avant le mot « fin » met en danger sa renommée et sa fortune et qui, pour rétablir l'une et l'autre, imagine l'aventure du chef de bureau Albert Soubiron et de la belle vieille Armandine - et ce avec les conséquences les plus curieuses pour son éditeur.
Le second n'exerce aucun métier. (Lequel permettrait de ne travailler qu'un jour sur deux? Le pauvre garçon ne vit, en effet, qu'à jour passé comme on dit : c'est le ressort qui actionne les péripéties du Temps mort.).
Le troisième, même pas rentier à l'instar du précédent, traîne sa misère dans la rue de l'Evangile, à l'ombre du Destin où préside l'imposante cafetière Mme Alceste, pour sa joie et son malheur.
Si le quatrième eut naguère heure de gloire et statue, le cinquième perd son âme par un joli petit tour du diable.
Les héros des autres contes ont, le nom excepté, la même propension à glisser du quotidien banal à une réalité plus satisfaisante et plus fantastique, fuyant le désagrément de leur condition. pour ce monde en marge, étourdissant d'invention et de percutante satire, qui porte la marque de Marcel Aymé.